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Woodrow Wilson. Les 14 points

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Woodrow Wilson
Les 14 points
[Après plusieurs tentatives de médiation, c'est seulement le 6 avril 1917 que les États-Unis déclarent la guerre à l'Allemagne. Après avoir vainement protesté contre le torpillage par les sous-marins allemands de navires comme le paquebot Lusitania (le 7 mai 1915, 1200 victimes) ou le Sussex (le 24 mars 1916, avec 4 autres navires entre le 16 et le 28 mars), ils réagissent alors à l'intensification de la guerre sous-marine contre tous les navires marchands, décidée par Guillaume II en février 1917, qui nuit gravement aux relations commerciales et viole le principe de la liberté des mers. À partir de juillet 1918, les troupes américaines joueront un rôle décisif. Mais les États-Unis n'adhèrent pas à la convention du 5 septembre 1914 entre les Alliés et ils définissent au début de 1918 leurs propres buts de guerre. Wilson énonce les 14 points, qu'il précise ensuite dans plusieurs déclarations ultérieures. Au moment de la conclusion de l'armistice, il offre ainsi des garanties à l'Allemagne, qu'il pense convertie à la démocratie et qui doit devenir un rempart contre le bolchevisme, en même temps qu'un partenaire commercial prospère : maintien de l'unité du Reich et montant des réparations fondé sur sa « capacité de payer ». Il ne tient aucun compte de sa défaite électorale (les républicains remportent les élections au Congrès le 5 novembre 1918), et veut appliquer rigoureusement son programme au cours des négociations de paix, au cours desquelles il se pose parfois en arbitre pour le présent et pour le futur (voir par exemple les articles 339, 357 ou 374 du traité de Versailles). Ce souci de ménager l'Allemagne provoquera des tensions avec la Belgique, l'Italie et surtout la France, dont il écarte les revendications territoriales et les exigences de garanties militaires. Avec le soutien de Lloyd George, il propose, en échange, à Clemenceau (lettre du 6 mai 1919), un pacte tripartite contre une éventuelle agression allemande, que le Sénat des États-Unis n'examinera même pas, et il impose un illusoire système de garantie collective fondé sur le pacte de la Société des Nations, que le même Sénat repoussera. Il obtient le prix Nobel de la paix en 1919.]
Message du 8 janvier 1918

[...] Nous sommes entrés dans cette guerre parce que des violations du droit se sont produites qui nous touchaient au vif, et qui rendaient la vie de notre peuple impossible, à moins qu'elles ne fussent réparées, et que le monde ne fût une fois pour toutes assuré contre leur retour.

Ce que nous exigeons dans cette guerre n'est donc rien de particulier pour nous-mêmes. Ce que nous voulons, c'est que le monde devienne un lieu sûr où tous puissent vivre, un lieu possible spécialement pour toute nation éprise de la paix, comme la notre, pour toute nation qui désire vivre librement de sa vie propre, décider de ses propres institutions, et être sûre d'être traitée en toute justice et loyauté par les autres nations, au lieu d'être exposée à la violence et aux agressions égoïstes de jadis. Tous les peuples du monde sont en effet solidaires dans cet intérêt suprême, et en ce qui nous concerne, nous voyons très clairement qu'à moins que justice ne soit rendue aux autres, elle ne nous sera pas rendue à nous-mêmes.

C'est donc le programme de la paix du monde qui constitue notre programme. Et ce programme, le seul possible selon nous, est le suivant :

1° Des conventions de paix, préparées au grand jour ; après quoi il n'y aura plus d'ententes particulières et secrètes d'aucune sorte entre les nations, mais la diplomatie procédera toujours franchement et à la vue de tous.

2° Liberté absolue de la navigation sur mer, en dehors des eaux territoriales, aussi bien en temps de paix qu'en temps de guerre, sauf dans le cas où les mers seraient fermées en tout ou en partie par une action internationale tendant à faire appliquer des accords internationaux.

3° Suppression, autant que possible, de toutes les barrières économiques, et établissement de conditions commerciales égales pour toutes les nations consentant à la paix et s'associant pour son maintien.

4° Échange de garanties suffisantes que les armements de chaque pays seront réduits au minimum compatible avec la sécurité intérieure.

5° Un arrangement librement débattu, dans un esprit large et absolument impartial, de toutes les revendications coloniales, basé sur la stricte observation du principe que, dans le règlement de ces questions de souveraineté, les intérêts des populations en jeu pèseront d'un même poids que les revendications équitables du gouvernement dont le titre sera à définir.

6° Évacuation du territoire russe tout entier et règlement de toutes questions concernant la Russie qui assure la meilleure et la plus libre coopération de toutes les nations du monde, en vue de donner à la Russie toute latitude, sans entrave ni obstacle, de décider, en pleine indépendance, de son propre développement politique et de son organisation nationale ; pour lui assurer un sincère et bienveillant accueil dans la société des nations libres, avec des institutions de son propre choix, et même plus qu'un accueil, l'aide de toute sorte dont elle pourra avoir besoin et qu'elle pourra souhaiter. Le traitement sui sera accordé à la Russie par ses nations soeurs dans les mois à venir sera la pierre de touche de leur bonne volonté, de leur compréhension des besoins de la Russie, abstraction faite de leurs propres intérêts, enfin, de leur sympathie intelligente et généreuse.

7° Il faut que la Belgique, tout le monde en conviendra, soit évacuée et restaurée, sans aucune tentative pour restreindre la souveraineté dont elle jouit au même titre que toutes les autres nations libres. Aucun autre acte isolé ne saurait servir autant que celui-ci à rendre aux nations leur confiance dans les lois qu'elles ont elles-mêmes établies et fixées, pour régir leurs relations réciproques. Sans cet acte réparateur, toute l'armature du droit international et toute sa valeur seraient ébranlées à jamais.

8° Le territoire français tout entier devra être libéré et les régions envahies devront être restaurées ; le préjudice causé à la France par la Prusse en 1871 en ce qui concerne l'Alsace-Lorraine, préjudice qui a troublé la paix du monde durant près de cinquante ans, devra être réparé afin que la paix puisse de nouveau être assurée dans l'intérêt de tous.

9° Une rectification des frontières italiennes devra être opérée conformément aux données clairement perceptibles du principe des nationalités.

10° Aux peuples de l'Autriche-Hongrie dont nous désirons voir sauvegarder et assurer la place parmi les nations, devra être accordé au plus tôt la possibilité d'un développement autonome.

11° La Roumanie, la Serbie, le Monténégro devront être évacués ; les territoires occupés devront être restaurés ; à la Serbie devra être assuré un libre accès à la mer ; les rapports des États balkaniques entre eux devront être déterminés par un échange amical de vues basé sur des données d'attaches traditionnelles et nationales historiquement établies ; des garanties internationales d'indépendance politique, économique et d'intégrité territoriale seront fournies à ces États.

12° Aux régions turques de l'Empire ottoman actuel devront être garanties la souveraineté et la sécurité ; mais aux autres nations qui sont maintenant sous la domination turque, on devra garantir une sécurité absolue d'existence et la pleine possibilité de se développer d'une façon autonome, sans être aucunement molestées ; quant aux Dardanelles, elles devront rester ouvertes comme un passage libre pour les navires et le commerce de toutes les nations sous la protection de garanties internationales.

13° Un État polonais indépendant devra être créé, qui comprendra les territoires habités par des populations indiscutablement polonaises, auxquelles on devra assurer un libre accès à la mer ; leur indépendance politique et économique aussi bien que leur intégrité territoriale devront être garanties par un accord international.

14° Il faut qu'une société des nations soit constituée en vertu de conventions formelles ayant pour objet d'offrir des garanties mutuelles d'indépendance politique et d'intégrité territoriale aux petits comme aux grands États.

Discours du 11 février 1918 1° Chaque partie du règlement final doit être basée sur la justice essentielle du cas particulier envisagé et sur les arrangements les plus propres à amener une paix qui soit permanente.

2° Les peuples et les provinces ne doivent pas faire l'objet de marchés et passer de souveraineté en souveraineté, comme s'ils étaient de simples objets ou de simples pions d'un jeu, même du grand jeu, maintenant à jamais discrédité, de l'équilibre des forces.

3° Tout règlement territorial se rapportant à cette guerre doit être fait dans l'intérêt et au bénéfice des populations intéressées, et non pas comme partie d'un simple arrangement ou d'un compromis de revendications entre États rivaux.

4° Toutes les aspirations nationales bien définies devront recevoir la satisfaction la plus complète qui puisse être accordée sans introduire de nouveaux ou perpétuer d'anciens éléments de discorde ou d'antagonisme susceptibles, avec le temps, de rompre la paix de l'Europe et par conséquent du monde. Retour à la page Textes

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